Fanny, c’est une des filles d’une des copines de ma maman. Ma maman et sa maman font de la musique ensemble depuis des années. La dernière fois que je l’ai vu, elle n’avait même pas dix ans. En ce moment, Fanny passe sa maîtrise à l’Ecole Polytechnique de Montréal, après avoir passé sa licence à l’Ecole Centrale de Marseille. Autant vous dire qu’elle s’y connait hyper bien en particules et en tous ces autres trucs qui moi, me faisaient pleurer de détresse devant mes copies de physique-chimie au lycée. L’année dernière elle a même fait un exposé sur les aurores boréales. Alors, quand elle m’a dit, « Je viens en fin de semaine pour chasser les aurores à Québec, tu veux venir? »… j’ai un peu (beaucoup) sauté de joie.
Voir une aurore boréale c’était clairement tout en haut de notre liste des choses à faire au Canada (et même plus généralement « avant de mourir »). Damien et moi, on a lu pas mal de sites à ce sujet : c’est tellement fascinant ! Damien s’est même inscrit sur un Twitter et un groupe Facebook qui donnent des alertes pour les soirs où les chances d’aurores boréales sont au plus haut et qui partagent des photos toutes plus incroyables les unes que les autres. Nous n’avions pas vraiment réalisé que nous avions des chances d’en voir une si près de la ville, à si basse latitude et comme nous n’avions pas de voiture et que nous ne sommes pas vraiment des scientifiques, nous avions un peu laissé tombé. Statistiquement, on peut observer les aurores à basse latitude une à trois nuits par mois. Mais on a eu la chance de pouvoir vivre ce moment unique avec Fanny, quelqu’un qui comprenait VRAIMENT ce qu’était une « éruption solaire » et un « orage électromagnétique ».
Quand Fanny parle des aurores boréales, je comprends un mot sur deux, mais c’est de la pure poésie. Pour moi, c’est une histoire de particules qui se cognent à l’atmosphère et paf qui font des chocapic! Ou pour vraiment bien vous expliquer :
» Une aurore boréale c’est un phénomène lumineux qui se produit dans le ciel, mais qu’on peut voir à l’œil nu. L’aurore se forme lorsque des particules chargées (électrons et protons) entrent en collision avec les gaz qui se trouvent dans la haute atmosphère terrestre. Ces collisions génèrent de minuscules éclats lumineux qui emplissent le ciel de lumière colorée. Ainsi, des milliards de petits éclats lumineux apparaissent en séquence, ce qui donne l’impression que l’aurore se déplace ou « danse » dans le ciel. Dans l’hémisphère nord, on appelle le phénomène aurore boréale, tandis que dans l’hémisphère sud, on parle d’aurore australe. » (là je cite le site de l’agence spatiale canadienne pour avoir l’air plus intelligent).
Plus on va vers le nord et plus l’aurore est visible. C’est pourquoi le Canada est un des pays privilégié pour la chasse aux aurores boréales. Mais pour voir une aurore, il faut être patient et surtout avoir de la chance.
Jeudi soir, vers minuit, nous sommes partis en direction de l’Ile d’Orléans à côté de Québec. C’est l’un des points qui est indiqué sur la carte des endroits d’observation des aurores au Québec. Fanny est venue de Montréal en covoiturage et un de ses amis de Québec nous a emmené avec eux en voiture à la chasse aux aurores. Le ciel étant très dégagé, les probabilités de voir les aurores étaient bonnes, mais encore une fois, la chance devait nous sourire ce soir-là. L’intensité des aurores est variable chaque soir et on les distingue donc plus ou moins bien à l’œil nu. Nous avons roulé plusieurs minutes en longeant le fleuve, puis coupé à angle droit pour nous enfoncer vers le milieu de l’île et nous éloigner des habitations dont les lumières constituent ce qu’on appelle la « pollution lumineuse » qui diminue nos chances de percevoir les lumières dans le ciel. Nous avons dû laisser la voiture au milieu d’un chemin, derrière une barrière qui nous coupait la route. Nous avons pris nos manteaux chauds, et nos appareils photos et nous sommes partis à pied le long du chemin qui s’enfonçait de plus en plus dans le noir. Le copain de Fanny, Mathieu, avait même prévu de la musique. Fanny nous l’avait dit, « nos yeux doivent s’habituer à l’obscurité pour mieux discerner l’aurore dans le ciel ».
Plus nous avancions dans l’obscurité, plus, au loin, derrière nous, en direction du nord, nous avions l’impression de voir une aura verte se dessiner. C’était très léger et comme il s’agissait d’une grande première pour chacun d’entre nous, nous n’étions pas bien sûrs de nous. Etait-ce une ville qui éclairait derrière la montagne ou était-ce nos yeux qui, voulant tellement voir une aurore, auraient pris le moindre jet de lumière pour le précieux phénomène lumineux? Nous avons décidé de nous arrêter de marcher et avons commencé à attendre, les yeux rivés sur l’horizon en direction du nord. Après quelques minutes d’attente, une lumière s’approchait, celle d’une lampe frontale braquée sur nous dans le chemin que nous avions emprunté. Un peu inquiets, nous avons attendu que l’ombre d’un grand homme soit à quelques pas de nous. Sa première question à notre encontre a été « vous êtes venu observer les aurores? ». Frontale, sac à dos, trépied, deux appareils photos et un spot déjà bien choisi « entre les pommiers », c’était bien là un habitué des aurores boréales. On lui a donc posé cent mille questions à la vitesse de la lumière avant qu’il ne s’enfonce plus encore dans le chemin et disparaisse à quelques mètres de nous. Avant de partir il nous a confirmé… que la lueur que nous apercevions était bel et bien une aurore boréale !
Et la magie a commencé. Même si la lumière verte était à peine perceptible au-dessus des montagnes, nous savions que nous étions en train d’en voir une, que le phénomène avait bien lieu, que nous étions des privilégiés, spectateurs d’un phénomène incroyable et unique. Plus les minutes passaient plus la lueur s’intensifiait. Fanny a réglé mon appareil, nous l’avons posé sur le poteau de clôture du champ dans lequel nous nous étions arrêté et appuyé sur le déclencheur. 13 secondes plus tard, le clic se fait entendre. La photo est prise et le résultat est incroyable. L’aurore se dessine sur l’écran comme nos yeux ne peuvent la percevoir. Verte, lumineuse, intense et dansante. Nous resterons là de longues minutes à observer le ciel, fiers et émus d’avoir pu assister à cet incroyable ballet lumineux que l’appareil photo nous révélait davantage à chaque cliché.