Dans quelques semaines nous allons quitter Québec. Et il faut avouer qu’un grand sentiment de nostalgie commence déjà à m’envahir.
Le Québec, c’est la deuxième étape de notre grand voyage, mais notre premier point de chute canadien. C’est l’endroit où, pour la première fois de notre vie, nous n’étions plus des touristes, mais bien des « étrangers ». Et oui, depuis plus de huit semaines, les étrangers, c’est nous.
Des milliers d’autres l’ont dit avant moi : « voyager c’est une leçon d’humilité ». Quand je me souviendrai du Québec, je me souviendrai de ce sentiment fort d’être un invité. Ici, on est aussi et seulement des gens de passage. Deux Français de plus…parmi tant d’autres. Deux Français qui débarquent avec dans leurs valises tout un tas d’idées reçues sur le Québec et les Québécois. J’ai d’ailleurs fini par arrêter de me demander si les Québécois sont vraiment aussi sympa qu’on le dit en France. Et plutôt que d’établir le triste constat qu’il y a des cons partout, je préfère retourner le problème et me convaincre (naïvement ?) que la bienveillance et la gentillesse sont des valeurs universelles. Ça me rassure.
Je me souviendrai des Québécois que j’ai rencontrés et de ceux que j’ai eu la chance de fréquenter. Je me souviendrai de leur franc-parler et de leur avis tranché sur les choses simples du quotidien et aussi sur les choses plus compliquées. De cette façon que certains peuvent avoir de te répondre d’un ton aussi catégorique que bienveillant : « Non, pas du tout », quand tu auras eu l’envie de partager un constat (certes un peu frais) sur leur belle région. Les Québécois que j’ai rencontrés sont fiers de leur province et de leur culture. Ils la défendent avec ardeur, même quand tu ne l’attaques pas vraiment. Et ils ont envie que tu partages les meilleures choses que le Québec peut t’offrir, alors ils te conseillent les meilleures « places » et orientent forcément ton voyage.
Je me souviendrai de leurs voix qui portent et de leur façon de t’accueillir quand tu rentres quelque part. De tous ces moments où j’ai eu l’impression de regarder un Xavier Dolan sans sous-titrage. De ces centaines d’expressions qu’on a fini par adopter (surtout moi) et de celles qui resteront à jamais incomprises. De cette cliente qui crie dans la cabine du magasin « Eye ouais c’est full beau, mais on dirait que j’ai des esties de grosses boules » (littéralement « ça me fait vraiment des putains de gros nichons ») ou de cette autre qui rentre pour me demander si je n’avais pas « du linge de cheerleading ». Et de ma collègue Eléonore qui m’appelle amicalement « grosse truie »… Étonnant.
Je me souviendrai de ma première poutine, mais surtout de la meilleure. De toutes ces fois où je me suis dit « C’est pas cher ! », en oubliant d’inclure les taxes. De tous ces aliments qu’on vend ici avec un goût de sirop d’érable (le bacon, les céréales, le pain, les haricots…). Je me souviendrai du Sacrilèges, du Bateau de Nuit, et de tous ces autres bars où une bière est, d’office, servie en pinte. Et où la pinte se commande fréquemment accompagnée d’un shooter.
Je me souviendrai de ces innombrables conversations autour de la météo. Véritable « Ice-breaker » comme disent les Américains. Un sujet intarissable, qui m’aura été utile maintes fois et qui m’aura permis d’apprendre que, NON, on ne s’habitue jamais au froid, même quand on est Québécois. Je me souviendrai du froid glacial, du vent qui te gèle les os et te brûle les joues et de la sensation désagréable que tes extrémités meurent à petit feu. Je me souviendrai du bruit de la neige et de celui de la glace sous nos pas peu assurés. De la rue Sainte-Ursule, que je descends chaque jour en me tenant au mur pour éviter la mort (j’exagère à peine) et que je remonte en crachant mes poumons et avec cette même sensation de fierté qu’on ressent après l’ascension d’un haut sommet (j’imagine). Je me souviendrai des paysages à couper le souffle, des incroyables couchers de soleils, de la neige qui s’étend partout à perte de vue, du calme qui règne après une tempête de neige et de l’excitation enfantine à l’idée d’être le premier à fouler le sol encore parfaitement lisse, et surtout, du bonheur d’être au chaud, à l’intérieur, pour regarder tomber la neige.
Dans quelques semaines nous aurons rejoint Toronto, pour de nouvelles aventures. On laissera ici des gens qu’on aime beaucoup, mes collègues, nos nouveaux copains français et québécois… On n’oubliera rien de ces trois mois passés à Québec, mais on a vraiment hâte de partir ! Je crois qu’on prend vite goût à la liberté que procure cette vie de « nomades » … [SORRY MOM]. Et on se prend même à rêver à tout un tas d’autres destinations (un peu plus ensoleillées peut-être ?) pour les prochains mois, ou les prochaines années.
En attendant on est toujours aussi heureux, s’il fallait vraiment le préciser.